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18 avril 2021 7 18 /04 /avril /2021 09:58
Fatima Benomar · Militante féministe · 17 avril 2021
Contact presse : 06 75 86 61 31
 
 
 
Contravention, délit, périmètre
Qu'est-ce qu'un relou ?
 
 
 
Émission intégrale : https://lnkd.in/drzbYX7 ⤴️
  
Difficile de qualifier la lourdeur aux yeux de la loi. Ce que l'on peut dire en revanche, c'est que la très grande majorité des comportements que l'on qualifie usuellement de "harcèlement de rue" ne sont pas de simples outrages sexistes dignes d'une contravention pouvant aller jusqu'à 750 €, mais des délits qui ont tendance à être systématiquement déqualifiés dans le débat public.
 
Un homme qui vous traite de "Sale pute" dans l'espace public n'est pas un relou. C'est un délinquant qui vous inflige une injure sexiste publique, passible d'un an de prison et de 45 000 € d'amende. Un homme qui répète à votre encontre des propos ou un comportement à caractère sexuel, commet un harcèlement sexuel, délit passible de 2 ans de prison. Un homme qui vous assène des menaces de mort ou de viol, en général quelques secondes après avoir été éconduit, commet un délit passible de 5 ans de prison. Un frotteur commet ce que la loi qualifie d'agression sexuelle, passible de 5 ans de prison, etc.
 
Pour son projet de créer des "zones rouges" identifiées, Marlène Schiappa a annoncé que des agents en civil seront déployés dans certains quartiers seulement, sur la base des très rares et peu représentatives contraventions qui y ont été données, où ont eu lieu des comportements qui se situent en deçà de tout ce qui est cité plus haut : sifflements, commentaires sur notre physique, propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste non répétés, chuchotements à l'oreille, et autres gestes souvent furtifs que subissent les femmes de la part d'hommes dans la rue.
 
Or tout le problème de cette expression "harcèlement de rue" est qu'elle délimite géographiquement un comportement masculin que l'on rencontre partout. La rue est, en revanche, le plus souvent un espace occupé par les classes populaires. Les hommes les plus aisés harcèlent plutôt les femmes dans les bibliothèques, à l'intérieur des pubs et des bars, dans les festivals, dans les couloirs de l'Assemblée et du Sénat, ce qui a entrainé la création du collectif "Chair collaboratrice", voire même en direct de l'hémicyle le jour où Cécile Duflot a osé s'y présenter en robe, dans les soirées privées comme l'illustre l'affaire Sandra Muller, dans les grands hôtels comme le faisait Weinstein. Tous ces faits passeront sous les radars, et les "relous" qui les commettent épargnés par la Justice comme par le débat public, qui ne s'attardera que sur ce qui se passe "dans certains quartiers".
 
Si, à la fin de cette opération Zones rouges, on tire la conclusion que le harcèlement est un comportement d'hommes pauvres, on sera bien évidemment passé à côté de ce dont on parle. D'un mauvais diagnostic on tirera de mauvaises pistes de solutions. Heureusement, #MeToo continuera à échapper au contrôle gouvernemental en démontrant que les couloirs de TF1 ou que le bureau du maire de Tourcoing sont autant de "zones rouges".
 
Pour l'imprescriptibilité des crimes pédocriminels et/ou incestueux
 
 Olivier Duhamel a reconnu (et minimisé) les faits. Pour rappel, une fellation forcée est un viol, et non un attouchement sexuel. Ces faits ayant été commis au début années 80, ils sont aujourd'hui prescrits. Il ne sera donc jamais poursuivi, et il n'est pas le seul dans ce cas.
 
En France, il aura fallu deux livres, "Le consentement" de Vanessa Springora et "La familia Grande" de Camille Kouchner, ainsi que la forte audience très révélatrice du hashtag #MeTooInceste, pour qu'on cesse d'ignorer ce fait majeur que 10% des françai-ses déclarent avoir subi des actes incestueux. Plus de la moitié ont fait état d'une amnésie traumatique, un mécanisme neurologique qui bloque la mémoire des victimes trop jeunes et vulnérables pour avoir les marges de manoeuvre suffisantes pour se défendre autrement. Ce mécanisme est, comme la sidération ou la dissociation, une stratégie d'autodéfense naturelle face à une situation insupportable à laquelle on ne peut échapper. Il arrive néanmoins que ces victimes recouvrent la mémoire plusieurs décennies plus tard, après expiration du délai de prescription qui est aujourd'hui de 30 ans après la majorité, et ne puissent plus porter plainte.
 
Il n'y a pas que l'amnésie traumatique qui explique ce temps si long entre le crime et la volonté de porter plainte. Il y a aussi, pour celles et ceux qui n'ont jamais oublié, tout le chemin qu'elles doivent parcourir pour dominer le sentiment de honte, les pressions familiales, la peur d'affronter une figure d'autorité ou de briser le cœur de ses proches en accusant un homme qu'iels aiment, et tout ce long chemin de reconstruction bordé d'addictions, de perte de l'estime de soi, de conduites à risques, de tentatives de suicides.
 
Enfin il y a toutes celles et ceux qui ont parlé tout-de-suite, qui n'ont pas été cru-es ou qui ont été prié-es de se taire. Autant d'obstacles temporels qui retardent l'initiative de s'en remettre à la Justice. Pour toutes ces raisons, nous réclamons l’imprescriptibilité des crimes sexuels sur mineur-es, ou, s'il nous répugne trop de remettre en cause le caractère exclusif de cette imprescriptibilité qui est aujourd'hui réservée aux crimes contre l'humanité, qu'on instaure des délais assez longs pour couvrir toute la durée de vie des coupables. Si le délai est porté à 60 ans, nous serons sûr-es qu'à tout âge, un pédocriminel pourra répondre de ses actes.
 
Si nous considérons l'amnésie traumatique comme « un obstacle insurmontable et assimilable à la force majeure », comme le prévoit l'article 9-3 du Code pénal qui peut « suspendre la prescription » ; si nous estimons que la crise a démontré que les navettes parlementaires pouvaient aller plus vite en cas d'extrême urgence ; nous pouvons aussi estimer que le fait qu'un-e français-e sur 10 soit aujourd'hui victime d'inceste, est une situation d'extrême urgence.
 
 
 Pour l'imprescriptibilité des crimes sexuels pédocriminels, incestueux entre autres, afin de permettre à ces enfants d'obtenir un jour justice, et aussi pour que des enquêtes soient menées même sur le tard, permettant à d'éventuel-les témoins ou à d'autres victimes de se signaler ⤵️
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